Quand Mona Chollet publie Chez soi en 2015, personne n'est en mesure de dire à quel point cet ouvrage s'appliquera si bien aux préoccupations du quasi monde entier en 2020... Avec son sous-titre de génie, "une odyssée de l'espace domestique", l'ouvrage est véritablement une ode aux casaniers et une réflexion sérieuse et iconoclaste sur le mode de vie domestique. Car loin des clichés sur l'irrépressible désir de voyage des urbains en mal d'espace (le fameux "les voyages forment la jeunesse"), Mona Chollet tâche de décrypter les ressorts de l'univers domestique et son lien avec les politiques publiques et commerciales à l'oeuvre depuis des années. Comme dans ses autres ouvrages, on suit le fil de sa pensée au fil des pages, sans rupture ni artifice argumentatif. Elle parle aussi bien du prix des loyers, de la nécessité d'avoir des espaces décents pour vivre, pour poser ses objets, inviter des gens, leur faire à manger, discuter que d'architecture japonaise ou d'internet. Le tout sans dogmatisme et avec une profonde humilité. Car Mona Chollet n'est pas une essayiste dogmatique et encore moins une donneuse de leçons. Malgré un discours radical et politiquement fort (elle condamne sans sourciller le capitalisme et son esprit vorace qui condamne nos villes et nos campagnes à n'être plus que des espaces ressources pour le bénéfice d'un tout petit nombre de fortunés nocifs), Mona Chollet affiche ses propres contradictions, sa fascination-addiction pour Pinterest, son choix de vivre dans la ville la moins spacieuse du monde (Paris)... C'est donc une lecture réjouissante et enthousiaste, un voyage au cœur de notre quotidien, sans bouger, en profitant de interstices de temps et d'espace, bien confortablement assis dans notre canapé ou notre lit, à l'abri et contre la fureur du monde.

Cet interview réalisée à la sortie de l'ouvrage vous donnera un bon aperçu du livre.